Sa renommée n’est plus à faire dans le milieu très hermétique de la haute couture marocaine. Pourtant, Hind Lemtiri ne peut pas se dire de la vieille génération, mais c’est certainement le legs familial qu’elle défend bec et ongles qui fait que l’on ressent un talent digne des grands couturiers à la vue de ses créations.
Interview.
Pourriez-vous nous parler un peu de votre univers ?
Ma grand-mère était styliste, ma mère l’est aussi. Ma tante a embrassé le même métier. Comme on dit chez nous : « nous avons la couture dans le sang ». J’ai grandi donc, au milieu de mains de fées et j’ai baigné dans cet univers de tissus, de précision, de savoirs… j’ai quand-même choisi de poursuivre des études en décoration d’intérieur. Après quoi, j’ai commencé à réaliser des caftans pour mes amies et pour certaines parentes. Un jour, une amie est venue me voir et m’a posé la question : « Pourquoi tu n’en ferais pas ton métier ? » C’était le déclic. J’ai décidé alors d’ouvrir mon propre atelier. J’ai commencé à créer des tenues. Cela fait plus de cinq années aujourd’hui que je commercialise mes créations au Maroc et à l’étranger. J’ai eu l’occasion d’habiller Pascale Michaalani, Adriana Karembeu (lors de l’ouverture d’un spa à Marrakech)… pour ne citer qu’elles.
Pour en revenir à mon univers, si mon style doit avoir une particularité, c’est celle de sauvegarder l’authenticité du caftan marocain, plus exactement le caftan fassi, puisque ma famille est originaire de la capitale spirituelle. Même pour le prêt-à-porter, je procède de la même manière. En revanche, pour les clientes qui viennent me voir avec une idée précise de coupe de caftan, je leur réalise ce qu’elles souhaitent. Aussi, tout est fait main, du travail du Maâlem au perlage en passant par la broderie rbatie… Quand je crée un caftan, c’est un modèle unique. Jamais ne me vient l’idée de faire un autre qui ressemble à ce dernier.
Qu’en est-il de la collection présentée lors de cette édition de la Fashion Days Maroc ?
Comme vous avez dû le constater, chaque caftan, en représentant mon style, avait son propre univers. Chaque création est complètement différente de l’autre. J’ai voulu miser sur cela afin de doter le public d’un maximum de choix. Il y a des caftans qui font l’apologie de la broderie rbatie que j’affectionne particulièrement. Le mariage des couleurs et l’incrustation de perles de Swarowski ainsi que le perlage les modernisent. Il y a une tenue noire incrustée de perles fluorescentes qui a beaucoup été remarquée pour son audace. C’est mon beldi façon moderne.
Votre tissu/matière de prédilection ?
J’adore les unis. Ils me permettent de les transformer telle une page vierge afin d’en faire ma propre création. Satin duchesse, crêpe de soie, velours de soie… J’aime bien certains tissus qui sont un peu rigides comme le satin duchesse, mais ce sont généralement les tissus très soyeux que je préfère.
Que pensez-vous de la mariée d’aujourd’hui ?
On ne voit plus cette mariée dont les tenues seront remisées au placard tant elles sont chargées et difficiles à porter. Tout cela est bien révolu. Aujourd’hui, la mariée est habillée de manière assez moderne. Il n y a plus de couleurs spécifiques à lui faire porter absolument. Désormais, la reine de la soirée est vraiment libre dans le sens où elle peut tout se permettre.
Lorsqu’une future-mariée vient vous voir pour la réalisation de ses tenues de mariage, que lui conseillez-vous ?
Je lui montre ma collection, j’observe son style et je vois quelles sont les couleurs qui pourraient lui aller le mieux. Puis, je lui propose des façons de travailler ces tissus et couleurs choisis ensemble : broderie, perlage, Zouak maâlem… il faut que la tenue puisse être en phase avec la personnalité de la mariée. A mon sens, une mariée doit porter ce qui lui va. Peu importe le reste.
Votre Ch’hioua de Ramadan ?
La table bien garnie de Ramadan est ma Ch’hioua car je ne suis pas une grande gourmande. Je mange avec les yeux, comme on dit.
Photos de Driss Ben Malek pour Chicadresse.ma
Interviews réalisées par Asmaa Chaidi