Parce que la Fashion Days est également l’occasion de consacrer une tribune aux créateurs de mode étrangers, ou marocains ayant fait leurs armes loin du bled, des stylistes comme notre Karim Tassi national, le Français Christophe Guillarmé qui habille les stars de Cannes et de Marrakech, ou encore le Libanais Rami Salamoune dont Haifaa Wahby affectionne particulièrement les robes, ont exhibé leurs dernières créations devant un public ahuri. La Fédération de la Couture Marocaine a ainsi démontré d’une réelle volonté d’ouvrir le Maroc sur le monde et de ne pas cantonner la haute couture dans le sempiternel caftan.
Hélène Segara, Hafsia Herzi, Maria Jurada, Nora Arnezeder, Victoria Silvstedt… pour ne citer qu’elles, ont toutes craqué devant ses robes et les ont portées pour monter les marches du festival de Cannes. De notre côté de la Méditerranée, ce sont Asmaa Khamlichi, Zineb Samara et bien d’autres étoiles filantes qui se sont parées au fil des éditions du festival du film de Marrakech, des somptueuses créations du jeune styliste qui a fait ses preuves chez Jean-Charles De Castelbajac avant de créer sa propre marque.
Bienvenue dans un retour à la Dolce Vita romaine façon Guillarmé.
Parlez-nous de votre univers ?
Je suis un jeune créateur en mode et je vis entre Paris, Marrakech et Cannes. Mon travail est fortement influencé par mes origines du sud de la France où je suis né, le côté un peu Riviera, la côte d’Azur… J’ai eu la chance de voir très jeune, les femmes qui montaient les marches du Festival de Cannes, qui ensuite, descendaient les chaussures à la main, pour s’évaporer dans la croisette. Tout cet esprit a beaucoup marqué mon enfance et adolescence et m’a donné envie de développer mon penchant pour l’esthétisme et, pourquoi pas, un jour, habiller ces étoiles… c’est ainsi que j’ai opté pour des études de stylisme à Paris. Aujourd’hui, j’ai la chance de vivre de ma passion. Paris m’a communiqué l’esprit Couture, l’esprit pur du stylisme, lesquels j’ai intégrés toutes ces couleurs et ce glamour qui ont bercé ma jeunesse. Voilà aujourd’hui douze ans que ma marque existe et mon parcours continue dans le bon sens. Je ne peux qu’être heureux d’avoir habillé plein de comédiens et de comédiennes en France… et cela fait déjà quatre ans que je viens habiller les vedettes du festival du film de Marrakech. De surcroît, quel bonheur de se trouver à Marrakech en décembre. Je pense que cette ville est dotée à cette période de l’année, du meilleur climat qui existe… sans parler de cette magie qu’on ne trouve nulle part ailleurs que dans la ville ocre.
Quelles sont les spécificités de la collection que vous présentez lors de cette édition de la Fashion Days Maroc ?
Ce que j’ai présenté est un peu hybride. Vous y trouvez les meilleures pièces de ma collection Automne/Hiver 2013/2014 dont le thème est « Bohème ». Il y a aussi, quelques pièces de la collection Eté 2014. Elles sont un peu plus extravagantes, plus fortes, très couture. J’essaie au final de raffiner de plus en plus mon travail, d’être de moins en moins dans le « too much ». Aujourd’hui, la mode va plutôt dans l’esprit Mad Men, dans les tendances dans années 50, 60, dans cette espèce de Social Life new yorkaise. De mon côté, j’essaie d’épurer, de pousser mon travail qui est à la base très « Riviera » vers cela. Par conséquent, j’expérimente de nouvelles matières comme le taffetas de soie… aussi, je vais vers des robes toujours aussi légères mais plus structurées.
Quelle est votre matière de prédilection ?
En fait, je travaille pratiquement toutes mes créations avec de la soie. J’aime l’extravagance mais j’aime aussi le confort. Je pense qu’aujourd’hui, il est impossible de porter des pièces qui ne vous mettent pas à l’aise. Globalement, on verse dans du « Casual ». La femme veut être sublime, avec une très belle silhouette mais il ne faut pas la contraindre avec des matières ou des coupes inconfortables. Du coup, je travaille tous les dérivés de cette matière noble qu’est la soie en misant sur du jersey de soie, du tulle de soie, de la mousseline de soie…
Quel regard portez-vous sur le caftan marocain et ses dérivés ?
J’aime bien le style de Nabil Dahani. Je trouve son travail très intéressant. On sent qu’il n’a pas d’énormes moyens mais il a présente beaucoup de créativité. J’aime beaucoup aussi Karim Tassi que je connais depuis des années à Paris. J’aime sa façon décalée par rapport aux codes du caftan, de retravailler le costume traditionnel. Il a vraiment su trouver son propre vocabulaire. J’aime beaucoup aussi ces tenues que je découvre au gré des éditions du festival du film de Marrakech… des mélanges de matières qui sont intéressants. Le fait de porter plusieurs couches, ce mélange de matières… c’est tellement intéressant. Le fait de porter une gandoura, c’est tout aussi charmant quoique différent. En somme, le costume traditionnel marocain est un vêtement chargé d’histoire. Il est sensuel même s’il ne moule pas le corps. Il y a une majesté qu’on retrouve dans le caftan marocain et pas ailleurs. Il est juste « Royal ».
Que pensez-vous des mariages marocains ?
Najia Abadi nous a passé la vidéo du mariage de son fils où la mariée a porté la tenue Fassia. Époustouflante, incroyable ! J’ai aussi eu l’occasion d’assister au mariage d’une amie marocaine. On sent qu’il y a le côté traditionnel qui se conjugue très bien, surtout à Marrakech, avec ce côté très flamboyant, très jet set, très hystérique… une folie de lumières, de sons. C’est grandiloquent, hallucinant ! Ici à Marrakech d’ailleurs, il y a des endroits qui se prêtent tellement à cet esprit parfaitement dans l’air du temps puisqu’aujourd’hui, la festivité, la démesure sont louées notamment dans le film « Gatsby le Magnifique ». Le Maroc est l’un des rares pays à réussir à métisser avec maestria la tradition avec tout le faste et la modernité…
Photos de Driss Ben Malek pour Chicadresse.ma
Interviews réalisées par Asmaa Chaidi